Archives de l’auteur : Tegwen Gadais

Božidar Jurjević

Boom!
Il vient de se passer quelque chose, un bruit horrible. C’est le signal… une étincelle, puis l’explosion, le déclenchement de tout. Une grande explosion. La mèche a été consumée depuis trop longtemps. La révolution, est désormais en marche.

crédit photo: Pierre-Luc Lapointe

crédit photo: Pierre-Luc Lapointe

Božidar est un athlète. Il s’entraîne pour la vivre et pour y survivre depuis des années. Chaque matin, en faisant preuve d’une discipline spartiate, il combat la gravité, lutte, et résiste à la fatigue et à la poussière. Les poids tombent sur le sol, les murs tremblent, les cordes se mettent en tension. Le bruit est assourdissant, mystérieux parfois. L’entraînement est méticuleux, planifié à l’avance, tel un athlète qui se prépare pour les Jeux olympiques. Son corps et son cœur doivent être prêts physiquement, musculairement, pour supporter les épreuves de ses performances. Le révolutionnaire doit être prêt à faire craquer les murs. Même lorsque l’oxygène vient à manquer, l’artiste ne doit pas s’essouffler. Il doit savoir reprendre son souffle dans un geste réflexe, nageur, même si l’environnement est hostile et non familier. Dans cette épreuve, il n’y a pas de droit à l’erreur: on survit ou on meurt! Il faut être prêt au combat. Prêt à y laisser la sueur de son front, prêt à se rouler dans la poussière, prêt à tirer des cordes, à pousser des murs, à lancer des poids et à recommencer encore, encore et encore. L’artiste ne laisse rien au hasard, car la révolution se prépare.

Božidar est un voyageur. Les idées d’une révolution ne lui viennent pas d’un coup. Il doit les nourrir, les laisser mûrir pour finalement en utiliser les fruits. Le voyage, l’autre, les rencontres, les différences nourrissent l’artiste. Ce sont des terrains d’expression et du matériel de bonne qualité pour son imagination comme on a pu le constater à Zaragoza en Espagne et à Québec au Canada.. Le voyage l’amène à devenir un «personnage tablette numérique», sorte de personnification de sa réflexion intérieure réalisée au Québec. Des mois à travailler, à se préparer, à essayer, pour enfin trouver comment exhaler l’idée. L’artiste voyage et fait voyager ses idées. Il a besoin de constamment garnir son carquois pour en tirer de bonnes flèches. Il a besoin de rencontrer l’autre pour lui demander sa version, son avis ou son opinion. Ainsi, se prépare la révolution Jurjevićienne. Dans la tête, mais aussi entre ses mains.

crédit photo: Ivan Binet

crédit photo: Ivan Binet

Božidar est neutre. Aussi surprenant que cela puisse paraitre, l’artiste a choisit de ne pas se draper d’une couleur particulière. Disons plutôt qu’il sait changer et se camoufler en fonction de son environnement ou de son objectif. Ne pas avoir de couleur, ne veut pas dire qu’il n’a pas de conviction. Car toute révolution est tachée de sang. Les expériences de la vie l’ont façonné pour qu’il choisisse de ne pas porter de drapeau. Il ne souhaite simplement pas porter d’étendard qui l’associerait avec une religion, trop restrictive à son goût. Il ne veut pas s’associer à un parti politique, dont la corruption mine la crédibilité. Il ne suit pas non plus de croyance particulière, il a l’inspiration comme meilleure alliée. L’artiste a pourtant la conviction que l’homme peut faire mieux, peut aller plus loin, peut être meilleur et plus beau. Il ne sert à rien d’être catalogué, comme l’illustrent ses restes de drapeaux brûlés; son étendard après la bataille. Il faut rester révolutionnaire en actes au service du peuple et de la majorité,

Božidar est un combattant. Il a été au plus proche du combat. Il s’est enrichit au cœur plus près du brouillard pour mieux le toucher pour mieux l’évaluer. L’artiste a vu l’animalité de l’homme incapable de se dominer, de se surpasser, de devenir l’humain au service des siens, de sa communauté et de son peuple. Il a vu la cupidité et toute l’absurdité humaine. Dans le bain de sang, il a compris la souffrance. Dans la boue, il a compris le terrain. Dans le brouillard, il a compris où était la lumière. La révolution est devenue son thème, son horizon. Il a été sur la première ligne des tranchées au combat. Il a vu le mal. Il a réalisé le bien. Il a choisit le bon.

Božidar est un travailleur. Les systèmes politiques lui ont donné l’inspiration corrompue. La pure graine de révolutionnaire. Une semence idéale. Le pouvoir assoiffe, le pouvoir appelle, le pouvoir grandit, mais le pouvoir assombrit, fragmente, affaiblit et rend perfide. Les systèmes politiques inspirent Božidar par leur corruption. Ils lui offrent un terreau fertile, sans limites et sans cesse renouvelé par un homme- animal. Un carnivore capitaliste trop puissant pour ses adversaires, gavé, et trop gourmant qui n’a même plus d’appétit. Mais l’artiste a choisit. Il a pris pour le peuple. Cette foule qui a soif de vérité sur son gouvernement qui l’enrôle. Elle finira par savoir, par connaitre et par destituer le monarque au sang bleu. Pourtant c’est bien du rouge qui coule sur le linge de cou du monarque. Le peuple a finit par savoir, par connaitre, apprendre et découvrir la nature du monarque et de ses sbires. Il est devenu meilleur. Plus conscient, plus réaliste plus proche de la complexe réalité sans cesse en mouvement. L’artiste est devenu un maitre.

Božidar est un croate. Son pays lui a donné tout ce qu’il est et tout ce qu’il est devenu. Il aime son pays, patriote. Il hait son pays, déserteur. Révolutionnaire diront certains. Il a la couleur rouge du sang, celle qui guide la révolution et celle du sang des martyrs innocents qui vont tomber au combat. Il n’a pas choisi d’ethnie, car l’homme est son créneau. La division n’existe qu’au travers des rôles que nous décidons de prendre d’assumer et de garder. Il a décidé de lutter contre les forces de la nature. Des éléments naturellement forts, des éléments naturellement sains. «The system is awfull» avait-il commencé par me dire. La nature est belle, ai-je pensé dans ma tête. Oseras-tu la défier ?

crédit photo: Ivan Binet

crédit photo: Ivan Binet

Boom !
Dans une révolution, tout commence et se termine par une explosion. Un bruit assourdissant qui installe le chaos et s’attaque à l’ordre. Il n’y a plus rien à brûler. Il n’y a plus rien à consommer. Les protagonistes sont fatigués. Ils doivent reprendre des forces… pour leur prochaine bataille. Sept blocs de glace, sept protagonistes congelés et pétrifiés par la bataille. Chacun dans son bloc reprend des forces avant la prochaine décongélation, le prochain carnage humain. Awfull